Chapter 11:  The Fascination of Noir

Notes

1Nino Frank, ‘Et la troisième dimension?’, L’Écran français, no.56, 24.7.46, p.3.

2 Nino Frank, 'Le Faucon maltais – une excitante...histoire à dormir debout', L'Écran français, no.58, 7.8.46, p.10.

3Jean-Pierre Barrot, ‘Une atmosphère, un personnage: une œuvre’, L’Écran français, no.59, 14.8.46, p.11.

4Georges Sadoul, ‘Grande Saison de noir’, Les Lettres françaises, no.121, 16.8.46, p.8.

5ibid.

6Pierre Mac Orlan, ‘Le domaine du fantastique’, L’Écran français, no. 21, 21.11.45, p.3.

7A number of their joint works survive in the archives of the Bibliothèque nationale in Paris: several interviews and plays, and a book, Montmartre ou les Enfants de la folie (Paris: Calmann-Lévy, 1956).

8Nino Frank, ‘Un nouveau genre “policier”: L’aventure criminelle’, L’Écran français, no.61, 28.8.46, p.6

9ibid., p.14.

10ibid.

11ibid.

12André Malraux, La Condition humaine (Paris: Gallimard, 1946 edition), p.247; and Jean-Paul Sartre, L’Existentialisme est un humanisme (Paris: Gallimard, 1996 edition), p.60.

13From three articles which all came out on 7.9.44: in order of the above quotations, Archer Winsten, New York Post; Bosley Crowther, New York Times; Kate Cameron, New York Daily News. Collected in Motion Picture Critics’ Reviews, 1944, pp.253-254.

14After the critical success of this journal between 1928 and 1931, but its ultimate financial failure, Auriol had always wanted to revive it. Finally, in 1946, he obtained the backing of Gaston Gallimard.

15Jacques Doniol-Valcroze and Amable Jameson (a favourite alias of Auriol), ‘Un réalisateur et ses personnages’, La Revue du Cinéma, no.2, 1.11.46, p.73.

16ibid., pp.73, 75.

17ibid., p.75.

18Jean-Pierre Chartier, ‘Les Américains aussi font des films “noirs” ’, La Revue du Cinéma, no.2, 1.11.46, pp.69-70. (This is the article which critics often group together with Nino Frank's article, as containing the earliest mentions of the American 'films noirs'.)

19ibid., p.70.

20ibid., pp.67, 70.

21ibid., p.70.

22Georges Sadoul, ‘Un homme et des bouteilles’, Les Lettres françaises, no.147, 14.2.47, p.8. Billy Wilder had insisted on going to New York for the exterior shots, and on filming Don Birnam (Ray Milland) walking the length of Third Avenue, trying to pawn his typewriter to get money for a drink. The cinematographer, John Seitz, took many of the shots with his camera concealed inside a truck, so that passers-by were unaware that they were being filmed.

23André Bazin, ‘The Lost Weekend [Le Poison], le drame de l’alcoöl’, L’Ecran français, no. 86, 18.2.47, pp.6,18.

24Jean Vidal, ‘L’aventure criminelle à sa plus haute tension’, L’Écran français, no.62. 4.9.46, p.6.

25ibid.

26Jacques Bourgeois, ‘La Tragédie policière’, La Revue du Cinéma, no. 2, 1.11.46, p.71.

27ibid., p.72.

28André Bazin, ‘Le Tueur à gages [This Gun for Hire]: Le tueur est trop sensible’, L’Écran français, no.82, 21.1.47, p.7.

29Amable Jameson (Jean George Auriol), ‘Le style germanique à Hollywood’, La Revue du Cinéma, no.6, Spring 1947, p.64.

30René Barjavel, ‘Les Tueurs: Les procédés de Citizen Kane dans un film de gangsters’, L’Écran français, no. 97, 6.5.47, p.7.

31Jean George Auriol, ‘Pauvre Cinéma, trop riche…’, Intermède 2 (Paris: Eds. Rombaldi, 1947), p.188.

32Raymond Borde et Etienne Chaumeton, Panorama du film noir américain, 1941-1953 (Paris: Flammarion, 1955), p.141.

33Eric Rohmer, ‘Livres de Cinéma’, Cahiers du Cinéma, vol.11, no.62, August-September 1956, p.57

34Raymond Borde et Etienne Chaumeton, ‘À propos du Film Noir Américain’, Positif, no.19, December 1956, p.53

35Robert G. Porfirio, 'No Way out: Existential motifs in the film noir', Sight and Sound, vol.45, no.4, Autumn 1976, p.214.

36Nino Frank, Petit Cinéma sentimental (Paris: La Nouvelle Edition, 1950), p.171.

37Georges Ribemont-Dessaignes, ‘Existentialisme et Cinéma’, L’Écran français, no.52, 26.6.46, p.5.

38Ribemont-Dessaignes, ibid.

39James Naremore and Patrick Brantlinger, Modernity and Mass Culture (Bloomington and Indianapolis: Indiana University Press, 1991)

40James Naremore, ‘American Film Noir: The History of an Idea’, Film Quarterly, vol.49, no.2, Winter 1995-6, p.14.

41ibid., p.24. The comment on ‘commodity culture’, betrays Naremore’s own postmodern stance. It was not present in this context in the writings of the French 1946 critics.

42James Naremore, More than Night: Film Noir in its Contexts (Berkeley, Los Angeles, London: University of California Press, 1998), p.41.

43ibid., p.43.

44ibid., p.45.

45See Nino Frank, ‘Souvenirs sur James Joyce: L’ombre qui avait perdu son homme’, La Table ronde, November 1949, pp.1671-1694; and ‘L’ombre qui avait perdu son homme’, Mémoire brisée (Paris: Calmann-Lévy, 1967), pp.29-64.

46See Les Cahiers Pierre Mac Orlan. (Paris: Comité des Amis de Pierre Mac Orlan, Primea Linea, 1990-1996), especially no.2 , ‘Mademoiselle from Armentières’, and no.5, ‘Les souvenirs de la nuit’.

47James Naremore, ‘A Season in Hell or the Snows of Yesteryear?’, Introduction to: Paul Hammond (ed.), A Panorama of American Film Noir, 1941-1953 (San Francisco: City Lights Books, 2002), pp.viii-ix.

48Naremore, ibid., p.vii, xii-xiii..

49Naremore, ibid., p.xi. (American spellings retained.)

50Francis Lacassin, Preface to Pierre Mac Orlan, ‘Vive la publicité’, texts from 1930 to 1959, Cahiers Pierre Mac Orlan, no.8 (April 1995), p,7.

 Additional bibliography

For further information on the 1940s journals L'Écran français and La Revue du Cinéma, see:

Barrot, Olivier, L'Écran français, 1943-1953: Histoire d'un journal et d'une époque (Paris: Les Editeurs français réunis, 1979)

Doniol-Valcroze, Jacques, 'Un riche voyage entre passé et avenir', Preface to Facsimile reprint of La Revue du Cinéma (Second series) (Paris: Librairie José Corti, 1979), pp. LXXXI-LXXXVI,

and for the covers and lists of contents of the whole series of the journals:

http://www.calindex.eu/parutions.php?larevue=EF [Ecran français]

http://calindex.eu/parutions.php?larevue=RDC [La Revue du Cinéma, 1946-1949]


Original quotations from which translations taken

(numbers match relevant endnotes)

1une troisième dimension: un peu de substance, un peu d’épaisseur, la logique de la vérité, définitivement substituée à la logique du cinéma.

3un sourire qui n’est jamais tendre, une sensualité qui ne s’abandonne pas lui composent une personnalité perverse à souhait.

4La noire Assurance sur la mort [Double Indemnity] est un bon film. Mais le rose Introuvable [The Thin Man] en était un meilleur encore.

5Il y a dix ans il était sucre d’orge, faveurs roses, bergerie. Mais il a maintenant compris les nouvelles nécessités de son commerce. Il mélange le fiel, l’absinthe, le sang, la boue. La Fille du Diable, film noir, est le comble de conformisme.

6La rue, qui est toujours riche en apparences troubles dès que le sommeil habite les maisons qui la bordent…les signes de la mort mêlés aux brumes savantes et aux fantômes de bruit qui la précèdent. Le noir et le blanc animés sont d’excellents créateurs d’angoisse.

9Ainsi ces films “noirs” n’ont-ils plus rien de commun avec les bandes policières du type habituel. Récits nettement psychologiques, l’action, violente ou mouvementée, y importe moins que les visages, les comportements, les paroles – donc la vérité des personnages, cette “troisième dimension” dont il m’est arrivé de parler ici même.

10Il n’est rien à quoi le spectateur d’aujourd’hui soit plus sensible qu’à l’empreinte de la vie, du “vécu”, et, pourquoi pas, à certaines atrocités, qui existent effectivement et qu’il n’a jamais servi à rien d’occulter; la lutte pour la vie n’est pas une invention actuelle.

11On fait intervenir un narrateur ou un commentateur, ce qui permet de fragmenter le récit, de glisser rapidement sur les parties de transition, et d’accentuer le côté “vécu”. Il est évident que ce procédé facilite le démarrage de l’histoire, et qu’il permet par ailleurs de mettre du dynamisme dans une peinture psychologique un peu mobile.

12Ce qui ne varie pas, c’est la nécessité pour lui d’être dans le monde, d’y être au travail, d’y être au milieu d’autres et d’y être mortel…[Ces limites] sont vécues et ne sont rien si l’homme ne les vit, c’est-à-dire ne se détermine librement dans son existence par rapport à elles.

15Les personnages de Laura – le cas est rare – ont une existence réelle…Que l’intrigue soit policière importe peu en définitive. Laura eût aussi bien pu être entraînée dans un drame de famille ou d’amour…Le prodige est de lui avoir donné la vie.

16Le miracle désiré par le public est d’abord souhaité, inconsciemment et sans espoir, par le jeune premier – dont on arrive à oublier qu’il n’est qu’un “poulet”. On sympathise même avec lui…presque aussi émouvant que le Gabin du Jour se lève.

17Clifton Webb…a buriné son rôle d’une main aussi experte qu’audacieuse. Peu nous importe qu’il soit coupable ou non, haïssable dans son inhumaine sophistication...En face de cette présence, nous vivons son destin personnel…Nous aurions tous été meurtriers.

18des jeux de formes tourbillonnantes qui font penser aux recherches du “cinéma pur” et la reconstitution d’un cauchemar et de troubles visuels dans le style de l’ancien cinéma d’avant-garde.

19on démonte sous nos yeux le mécanisme psychologique par lequel Walter Neff se laisse entraîner dans l’engrenage rigoureux de l’aventure. Les ressorts de l’action ne sont pas extérieurs: la séduction du bon jeune homme par une garce calculatrice, la tentation du crime parfait, le défi inconscient jeté à l’ami chargé de déceler les escroqueries prennent une vraisemblance telle qu’on se sent engagé personnellement dans cette sombre histoire.

20on imagine mal qu’on puisse aller plus loin dans le pessimisme et le dégoût de l’humanité…On a parlé d’une école française des films noirs, mais Le Quai des brumes ou L’Hôtel du Nord avaient au moins des accents de révolte, l’amour y passait comme le mirage d’un monde meilleur, une revendication sociale implicite ouvrait la porte à l’espoir.

21L’impression de folie et de vide stupide que laisse le spectacle de cet homme jeune, possédé par cette unique passion, fait de The Lost Weekend un des films les plus désolants que j’ai vu.

22L’angoisse et la honte pèsent sur le spectateur que Billy Wilder a réussi – comme dans L’Assurance sur la mort – à identifier au coupable. Et la grande réussite du film est aussi d’avoir, pour la première fois depuis longtemps, fait participer une ville réelle, New York, et non les constructions de studio à l’action dramatique.

23la preuve éclatante que la puissance d’analyse psychologique du cinéma n’est pas inférieure à celle de la littérature…cette prestigieuse et glaciale habileté du découpage de Billy Wilder. Assurance sur la Mort révélait déjà la pureté racinienne de cette langue cinématographique. Dans Lost Weekend la simplicité du style atteint à la perfection de l’invisible.

24La Femme au portrait[The Woman in the Window] est une aventure criminelle, un film “noir” qui se déroule dans cette atmosphère de clair-obscur chère à la jeune école hollywoodienne.

25Le sentiment d’étrangeté, de fantastique que nous éprouvons ici ne doit rien au surnaturel: il repose au contraire dans le réalisme des situations et du comportement des personnages…Tout est si vraisemblable que chaque spectateur peut penser qu’il eût agi, en de telles circonstances, comme le meurtrier involontaire.

26Fritz Lang n’a jamais traité qu’un seul sujet, le sujet tragique fondamental: l’homme vaincu par son destin…Comme dans la tragédie grecque d’avant Socrate, le héros n’est ni bon ni mauvais: toute morale est exclue de l’affaire; il figure l’homme désindividualisé aux prises avec une aventure particulière que lui a préparé le Destin.

27L’intensité tragique nous frappe d’autant plus que les événements sont situés dans notre monde de tous les jours et que l’aventure du professeur Wanley peut arriver à chacun de nous…il s’agit bien d’une tragédie où Fritz Lang nous entraîne tout entier, après nous avoir fait mettre le doigt dans l’engrenage.

28Billy Wilder, Siodmak, Fritz Lang, Otto Preminger, Alfred Hitchcock ont porté le genre à un haut niveau de perfection formelle…On peut, une fois de plus, admirer dans Le Tueur à gages[This Gun for Hire] l’excellence d’une technique, à laquelle manque pourtant la marque distinctive d’un metteur en scène.

29le récent développement de l’influence de la vieille “école” mittel-européenne dans le cinéma américain…tandis que Fritz Lang montre les aspects tragiques de la vie américaine dans cette lumière dure et tranchante qu’il a apportée de Berlin, tout un groupe d’auteurs et réalisateurs d’origine germanique expriment leur propre drame à travers les thèmes de désespoir proposés par la littérature noire de James Cain et compagnie.

30Le début du film est saisissant. On s’attend à un déroulement brutal, aussi bien sur le plan psychologique que sur celui de l’action…le reste n’est plus qu’un roman policier...Les retours en arrière…font ici déjà figure de procédé, de poncif.

31Les films noirs qui nous viennent d’Amérique et qui prolongent la vieille mode réaliste française et germanique (de Zola à Wedekind)...On ressent même une peur plus forte à suivre le fil d’Ariane qu’il a implacablement déroulé dans sa Femme au portrait qu’à assister aux scènes de brutalité de Murder, My Sweet ou du Faucon maltais. Mais on n’y respire pas le meme air déprimant que dans les films adaptés ou imités de James Cain et autres…des humains à la dérive dans la morne vie d’aujourd’hui.

32Le Poison[Lost Weekend] de Billy Wilder avait été classé un peu à la légère dans le genre noir, sans doute à cause des scènes d’hôpital et de la description d’un delirium tremens. Mais il y manquait l’insolite et le crime.

33le film noir n’est pas (heureusement) un pamphlet politique, même s’il lui est arrivé de dénoncer, et avec une rare franchise, certains abus. Il repose sur des conventions sans lesquelles il ne serait pas ce qu’il est. Prétendre le juger selon une certaine esthétique ou éthique surréaliste, c’est: 1. nous ramener trente ans en arrière; 2. proclamer une servitude, inadmissible, du cinéma à l’égard de la littérature, et de la littérature populaire (mais non pour autant méprisable) à l’égard de paradoxes esthétiques.

34Le film noir apporte, à notre avis, une atmosphère d’ambiguïté et de bizarrerie, une cruauté exacerbée, un climat névrotique qui sont totalement nouveaux…La règle, avant la guerre, était de trancher nettement entre les bons et les méchants…En un mot le cinéma policier de 1935 était socialement sain. Or le vrai film noir est une transposition à peine déguisée du cauchemar, et il met en cause un ordre social fortement corrompu.

36Nous n’avons jamais parlé existentialisme, et d’ailleurs c’eût été vain, car je n’ai pas la cervelle le moins du monde philosophique. C’était l’homme qui si intéressait et non le penseur, l’homme et son débat intérieur.

37Après 1918 nous avons eu dada, explosion de joie incendiaire, puis le surréalisme, expansion totale du vieux fonds des rêves jusqu’à en submerger la vie. Aujourd’hui, nous avons ce que nous méritons pour avoir accepté la catastrophe: nous avons l’existentialisme.

38Mais, si le cinéma est tributaire des morales collectives, il demeure en même temps, et mystérieusement, une libération secrète de l’individu.

50Ce qui frappe chez Mac Orlan, c’est un modernisme reconnu, dès 1923, par les jeunes gens qui fréquentaient son salon de la rue du Ranelagh: André Malraux, Pascal Pia, Nino Frank, Joseph Delteil…Ils admiraient en lui son approche nouvelle du roman dont il avait élargi le champ et les thèmes en faisant appel aux filles, aux soldats, aux matelots, aux marginaux de la vie nocturne. Sans doute étaient-ils encore plus sensibles à sa faculté de sublimer, sous le nom de fantastique social, les aspects négligés du merveilleux quotidien.